Points de vue

Les Contrepoints de la Santé - 8 février 2022

Médecine de ville : un avenir aux défis nombreux (Débat)

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Les Contrepoints de la santé du 8 février 2022, organisés amont de l’élection présidentielle, ont mis l’accent sur la médecine de ville. Face aux nombreuses difficultés rencontrées sur le terrain, quelles solutions ? Le Dr Jean-Paul Ortiz, néphrologue et ancien président de la CSMF, syndicat polycatégoriel de médecins libéraux, Dominique Polton, auteure de « Santé, liberté faut-il choisir ? » et Stéphanie Rist, députée la REM du Loiret et conseillère municipale d’Orléans, ont échangé sur le sujet.

 

Déserts médicaux qui poursuivent leur progression, remise en cause de la liberté d’installation des médecins, urgences renvoyées à l’hôpital, manque de coordination entre soignants, délégations de tâches insuffisantes… les défis du système de santé sont nombreux. L’une des causes principales ? Pas de secret : la gestion du numerus clausus. « Aujourd’hui nous le payons cher, a regretté le Dr Ortiz. Nous avons des difficultés d’accès aux soins et nous observons que la surcharge de travail des médecins libéraux ainsi que leur engagement sur le terrain ne sont pas de nature à attirer les jeunes générations. »

 

 

Autre phénomène marquant : la nouvelle génération de médecins affiche des aspirations différentes de l’ancienne, notamment la recherche d’un exercice regroupé, en équipe, sans pour autant vouloir rogner sur leur temps personnel.

 

Renforcer l’environnement professionnel du médecin

L’une des solutions : gagner du temps médical « en développant par exemple des formes d’exercice de type binôme médecins-infirmiers, facilitées par le fait qu’il y a maintenant des assistants médicaux », a rappelé Dominique Polton. Néanmoins, cela implique, d’après le Dr Ortiz « de simplifier les critères d’attribution » de ces nouveaux professionnels. Il regrette qu’actuellement, pour disposer d’un assistant médical, les médecins doivent s’engager à augmenter leur patientèle. « Ce qui manque dans l’évolution de notre système de système, c’est la confiance de l’Assurance maladie vis-à-vis du corps médical », a-t-il ajouté.

Pour Stéphanie Rist, outre cette mesure à court terme, il est crucial de prévoir des mesures à moyen terme, notamment autour des compétences des professionnels de santé, en attribuant notamment l’accès direct et la primo-prescription aux infirmières en pratique avancée (IPA). D’ailleurs, pour avancer, le Dr Ortiz encourage de permettre aux cabinets médicaux d’avoir recours aux IPA en libéral ou en salariat.

 

Encourager l’exercice collectif

Autre solution évoquée : l’exercice collectif qui, en maisons de santé pluriprofessionnelle (MSP), ne rassemble que 15 % des médecins généralistes d’après les chiffres du Dr Ortiz. « Je crois qu’il faut pousser au travail en équipe, qui peut être multisites et sous des formes différentes », a soutenu Dominique Polton, qui plaide pour des formes plus intégrées et structurées.

De son côté, l’ancien président de la CSMF revendique des solutions davantage concertées entre les professionnels de santé. « Il est certes indispensable que demain, nous assumions cette responsabilité territoriale vis-à-vis de la population, mais à condition d’être plusieurs à l’assurer et d’être accompagnés par les collectivités locales, a-t-il indiqué. Quand j’observe que ces dernières salarient des médecins, cela pose le problème du modèle économique. Je préférerais qu’elles accompagnent les médecins libéraux dans la mise en place d’un exercice multisites en pluriprofessionnalité. »

 

Laisser aux acteurs de terrain l’initiative des solutions déployées

Concernant la coordination des soins sur le territoire, les actions mises en œuvre par les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) sont reconnues mais, « il faudrait les développer avec des équipes de soins spécialisées et des financements dédiés », a encouragé le Dr Ortiz, rappelant la nécessité de laisser aux acteurs de terrain l’initiative des solutions déployées. Pour Dominique Polton, l’une des priorités reste toutefois d’accompagner les territoires où ces dynamiques sont inexistantes.

« 100 % du territoire français doit être couvert par ces CPTS parce qu’elles permettent de définir des coopérations et des parcours sur les accès directs, en s’adaptant aux besoins du territoire », a souligné Stéphanie Rist, soutenant l’importance d’inclure les établissements hospitaliers. Et d’ajouter : « L’hôpital de proximité est un acteur indispensable, à condition de travailler, là encore, sur le financement des professionnels libéraux afin qu’ils s’impliquent dans ces établissements, à la frontière entre la ville et l’hôpital. »

Retrouvez ici les précédents débats des Contrepoints de la Santé

 


En chiffres

  • 30 % des Français sont inquiets pour l’avenir de la médecine de ville.
  • 37% des Français déclarent rencontrer des difficultés à prendre rendez-vous avec leur médecin généraliste, soit 16 points en plus par rapport à l’année dernière, ce qui révèle une situation d’accès aux soins qui se tend.
  • 45% des répondants révèlent rencontrer des difficultés à accéder à un chirurgien-dentiste.
  • 52% des Français parlent de difficultés pour prendre rendez-vous chez un spécialiste, soit plus 11 points par rapport à l’année dernière.
  • 37 % des Français déclarent avoir rencontré des difficultés d’organisation dans le cadre de leur parcours de soins coordonnés.
  • 81 % considèrent que les outils comme les applications en santé, sont efficaces pour le système de santé.

Source : Sondage BVA pour les Contrepoints de la santé

 

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