Points de vue

Les Contrepoints de la Santé - 1 juillet 2020

Santé et dépendance : quel financement dans le contexte de la COVID-19 ?

Le 25 juin, à l’occasion des Contrepoints de la SantéJérôme Guedj, Chargé d’une mission sur l’isolement des personnes âgées et fragiles, ancien député et Conseiller départemental de l’Essonne, était aux côtés de Dominique Libault, Président du Haut Conseil du Financement de la Protection Sociale et pilote du rapport « Concertation Grand âge et autonomie », pour débattre sur le thème « Santé et dépendance : quel financement ? » L’occasion de rappeler que notre modèle de protection sociale a, à nouveau, dans une situation de crise exceptionnelle, joué son rôle d’amortisseur. Une rencontre, comme d’habitude, organisée et animée par les journalistes Philippe Leduc, Pascal Maurel et Renaud Degas.

 


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Le rôle social de la Sécu

La crise liée au Covid-19 a créé une situation financière alarmante : plus de 30 milliards d’euros de déficits pour l’Assurance maladie, plus de 50 milliards pour la Sécurité sociale. Une « fourchette basse », selon Dominique Libault, Président du Haut Conseil du Financement de la Protection Sociale.

La « Sécu » pâtit des effets de la Covid-19, c’est incontestable. Pour autant, « il ne faut pas oublier que la Sécurité sociale, et plus largement notre modèle de protection sociale a, à nouveau, dans une situation de crise exceptionnelle, joué son rôle d’amortisseur », note Jérôme Guedj, insistant pour que l’on cesse de la voir comme une charge mais plutôt comme un investissement et une chance pour notre pays.

Que serait la situation sans les dispositifs mis en place, financés par la Sécurité sociale, tels que celui du chômage partiel ? « Ces déficits, cette dégradation des comptes est un garde-fou pour éviter une situation qui soit pire d’un point de vue sanitaire et économique », martèle l’ancien député.

 

Autonomie et métiers du grand âge 

Par ailleurs, « malgré les difficultés financières », le Gouvernement maintient la création d’une cinquième branche Autonomie avec « l’affectation sans doute insuffisante mais non nulle, de moyens », relève Dominique Libault. « Il faut saluer cet effort », qui est selon lui, « totalement nécessaire ».

Il faut dire que les besoins sont énormes en ce domaine, y compris en termes d’encadrement et de personnels. Dans un premier temps, cela impliquera des dépenses. Or, « investir sur les métiers du grand âge, c’est investir sur l’emploi et ça me semble extraordinairement important en la période actuelle », évoque-t-il.

Et d’ajouter : « Il faut aussi construire des ressources pérennes pour la branche de la Sécurité sociale ». C’est pour cela qu’une mission vient d’être lancée autour des contours et du financement de cette branche Autonomie, confiée à Laurent Vachey, détaille-t-il.

Autres enjeux : développer des logiques de prévention et d’adaptation de la société au vieillissement de la population, pour faire face à une « révolution de la longévité », renchérit Jérome Guedj, pour éviter la « survenance de la perte d’autonomie ».

 

La dette COVID : Sécu ou État ?

Comment faire face à l’ensemble de ces défis ? « Le sujet n’est peut-être pas si simple que cela », reconnaît Dominique Libault, qui rappelle qu’il y a d’un côté, « l’idée traditionnelle, dans la gestion de la Sécurité sociale, d’éviter de transmettre une dette aux générations futures sur les dépenses de redistribution d’une génération ». C’est « cela qui a motivé la création de la Cades », avec l’objectif d’éteindre la dette sociale d’ici 2024 grâce à cet effort et de retrouver des « marges de manoeuvre » pour faire face, notamment, au vieillissement de la population.

D’un autre côté, « nous sommes aujourd’hui dans une situation nouvelle, avec des déficits extrêmement importants », ajoute-t-il. « La question qui se pose est de savoir si on a les moyens à la fois de payer sur un rythme relativement rapide la dette conjoncturelle qui dépasse la Sécurité sociale, qui est la dette Covid, et en même temps de revenir à l’équilibre et d’assumer les charges liées à l’évolution de la population française ».

 

Dette COVID, un risque pour la santé

Une chose est sûre, « le transfert intégral de la dette Covid – 136 milliards d’euros – sur la dette sociale limite les marges de manœuvre disponibles pour financer ce qui était nécessaire avant la crise : le soutien à l’hôpital public, le grand âge et la dépendance », pointe Jérôme Guedj, Chargé d’une mission sur l’isolement des personnes âgées et fragiles.

Selon lui, c’est un débat à la fois politique et démocratique qui doit s’ouvrir.

 

Rendre à la Sécu ce qu’on lui prend

Pour conclure, Jérome Guedj met donc en garde sur la tentation de récupérer une partie des excédents générés par la Sécurité sociale pour compenser les difficultés du budget de l’État. Dominique Libault insiste quant à lui sur l’importance de « relations claires » entre Sécu et État.

 

Sécuriser le budget de la Santé

Enfin, les deux intervenants se sont s’interrogés sur la nécessité de « sécuriser » un budget dédié à la santé…

… et de repenser l’Ondam. Dominique Libault prône en effet de « sortir de l’annualité stricte » et de se baser sur une question simple mais fondamentale : « De combien a-t-on besoin dans notre pays pour assurer le financement de la santé et de l’accès aux soins? » Un sujet au coeur des débats du Ségur de la Santé, qui s’achèvent le 3 juillet.

 


Débat organisé et animé par Philippe Leduc (LDC Santé), Pascal Maurel (Ortus) et Renaud Degas (La Veille des acteurs de la Santé – Presse Infos +), filmé et diffusé le 9 juin 2020.

Événement organisé en partenariat avec Le Groupe Pasteur Mutualité, Groupe Point Vision, Carte blanche, Canon Medical, Qare et BVA.


Revoir les précédents Contrepoints de la Santé :

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