Le 21 décembre dernier, les Contrepoints de la Santé, dont nous sommes partenaires, ont accueilli le Pr Brigitte Autran, présidente du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires, ou « Covars ». L’occasion, pour elle, de revenir sur le rôle et les travaux de cette instance créée l’été dernier.
Le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars), qui a débuté ses travaux en septembre dernier, remplace le conseil scientifique Covid présidé par le Pr Jean-François Delfraissy (1). Pourquoi un nouveau comité ? Comment va-t-il travailler ? Quels sont aujourd’hui les risques, comment les anticiper ? Autant de questions posées au Pr Brigitte Autran, présidente de l’instance, lors des Contrepoints de la Santé du mois de décembre.
Comme son prédécesseur, chargé d’éclairer les décisions du Gouvernement, « le Covars est un organe consultatif », rappelle-t-elle ainsi. Il n’a donc, en somme, aucun pouvoir décisionnel (2).
Son rôle ? Assurer une veille scientifique, surveiller, prédire et modéliser les risques sanitaires, apprécier leurs conséquences « physiques, psychiques et sociétales » et, si nécessaire, émettre des recommandations. Et ce, dans une approche de santé globale (One Health), en tenant compte des risques liés aux agents infectieux atteignant l’homme et l’animal, aux polluants environnementaux et alimentaires, ainsi qu’au changement climatique.
Polio, VIH, Ebola, sarbecovirus, grippe aviaire
Dans le viseur de cette instance : la polio, le VIH ou encore, le virus Ebola, dont une souche « vraiment préoccupante » et résistante au vaccin développé dans « les années 2015-2016 » frappe actuellement le Soudan. Néanmoins, « un nouveau vaccin adapté à ce variant Ebola » est « en essai clinique actuellement », relève le Pr Autran, par ailleurs professeure émérite en immunologie à la faculté de médecine Sorbonne Université.
L’épidémie de Monkeypox est elle aussi scrutée de près, bien qu’elle soit aujourd’hui « très bien contrôlée en France et dans tous les pays où elle continue à très bas bruit de façon asymptomatique », rassure-t-elle. En « repli », elle reste « cantonnée aux sujets à risque », lesquels « se sont bien vaccinés ». La présidente du Covars salue ainsi un bel exemple « d’appropriation des moyens de prévention » : « cette appropriation par chacun de nous des risques et des moyens de prévention, je crois que c’est ça la clé ».
« Les infections respiratoires constituent de grands risques », ajoute-t-elle. Au-delà du Covid-19, les sarbecovirus, regroupant les coronavirus liés au syndrome respiratoire aigu sévère dont les Sars-CoV-1 et Sars-CoV-2, « pullulent » parmi « les chauve-souris d’Extrême Orient ». Quant à la grippe aviaire sauvage, auparavant « saisonnière », elle est « aujourd’hui permanente » : le risque de « mutations », de « recombinaisons de virus de grippe » et de transmissions à l’homme est donc accru.
La vaccination comme meilleure arme
Face à ces risques, elle préconise une médecine humaine et vétérinaire ainsi qu’une surveillance Anses/Santé Publique France plus interconnectées, pour une meilleure corrélation des signaux recueillis. « L’anticipation par la vaccination » est également essentielle, insiste-t-elle. Y compris face à l’essor de pathologies transmises par les moustiques. Car s’il existe un vaccin contre la dengue, par exemple, il n’y a, pour l’instant, que des candidats vaccins contre le chikungunya et le virus Zika. La recherche est donc cruciale et les vaccins à ARN messager, « à réponse rapide », offrent un certain nombre de perspectives intéressantes.
Reste, enfin, l’enjeu de l’acceptation par la société des différents moyens de prévention possibles. « C’est un champ de travail très important dans lequel nous avons débuté nos réflexions », expose la présidente du Covars. Plus largement, c’est aussi « la perception sociétale des risques sanitaires, ce qu’on appelle les risques psychosociaux associés à l’accumulation de risques sanitaires » qui est examinée !
(1) Placé auprès de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que du ministre de la Santé et de la Prévention, le Covars est composé de 18 membres de tous horizons : virologues, infectiologues, épidémiologistes… Il inclut également un entomologiste, un médecin généraliste, un urgentiste, deux vétérinaires, des chercheurs en sciences humaines et sociales, ou encore des représentants de patients et de citoyens.
(2) L’Angleterre dispose, elle aussi, d’un conseil scientifique, le « government’s scientific advisory group for emergencies », ou « Sage », créé à l’issue de la crise sanitaire de la vache folle. Les autres pays européens ont, eux, à ce jour, plutôt conservé un conseil scientifique Covid.