Points de vue

Les Contrepoints de la Santé - 6 février 2020

Crise de l’hôpital : quelles solutions pour en sortir ?

Une nouvelle année débute mais les problèmes majeurs du système hospitalier ayant catalysé les grèves de l’an dernier n’ont pas disparu pour autant, malgré les promesses. Pour discuter des chemins possibles pour sortir de la crise, les Contrepoints de la Santé ont réuni, le 31 janvier dernier, Jérôme Goemmine, Directeur du centre hospitalier Verdun et Directeur Général du Groupe hospitalier de territoire (GHT) Coeur Grand Est, Cédric Lussiez, Directeur du Groupe Hospitalier du Nord Essonne, et le Pr Rémi Salomon, Président de la Commission médicale d’Établissement de l’APHP et Chef de service de néphrologie pédiatrique à Necker-Enfants malades.


Un évènement en partenariat avec :


Vidéo intégrale du débat


 

Nouvelle année, nouveau lieu. Pour la première édition 2020 des Contrepoints de la Santé, les journalistes Renaud Degas (Presse Infos+, La Veille des acteurs de la Santé) Pascal Maurel (Ortus) et Philippe Leduc (LDC Santé) ont réuni trois acteurs clé du secteur hospitalier au Solférino, à Paris. L’occasion de faire le point sur la crise qui mine l’hôpital depuis des mois… voire des années.

Conditions de travail difficiles et perte de sens

« Sur le terrain, cela se passe difficilement. Les personnels sont en grève depuis plusieurs mois. Ils sont assignés. Ils font face à un très grande nombre de difficultés », évoque Cédric Lussiez, directeur du Groupe Hospitalier du Nord Essonne. Dans son établissement, une trentaine d’infirmières sont parties en moins de trois mois, du fait de « conditions de travail de plus en plus difficiles » et de perte de « sens dans leur métier ».

Il poursuit : « des personnels sont appelés en renfort, en remplacement » ; « grâce à la mobilisation des uns et des autres, on pallie à des difficultés. Mais ces réponses de court terme épuisent à moyen terme ».

« Le malaise est profond, depuis longtemps, confirme le Pr Rémi Salomon, Président de la Commission médicale d’Établissement de l’APHP et Chef de service de néphrologie pédiatrique à Necker-Enfants malades. Le système est au bord de l’effondrement. Et ce, malgré plusieurs plans successifs d’urgence. »

Sortir du blocage, ouvrir des négocations salariales

Pour lui, il est « urgent » de sortir du blocage. Il faut que le gouvernement prenne acte « que les mesures proposées sont insuffisantes », ouvre les discussions et « fasse un geste ». 

Il revient ainsi sur la série de démissions de chefs de service dans les hôpitaux publics qui révèle la « gravité de la situation ». Ils sont « près d’une centaine à l’AP-HP » : « les chefs de service le font la mort dans l’âme », insiste le Pr Rémi Salomon.

« La santé publique ne peut être une variable d’ajustement », rappelle-t-il.

Pour un “Plan Marshall“ à l’hôpital

« Il faut un ‘plan Marshall’ pour revaloriser les rémunérations des professionnels hospitaliers et améliorer les liens ville-hôpital, acquiesce Jérôme Goemmine, Directeur du centre hospitalier Verdun et Directeur Général du Groupe hospitalier de territoire (GHT) Cœur Grand Est. La démographie médicale et paramédicale est déclinante voire en tension. Il faut le courage politique de renforcer notre tissu sanitaire en ville et à l’hôpital sur l’ensemble de notre territoire. »

Les invités des Contrepoints de la Santé ont toutefois mis en garde contre une énième réorganisation de l’hôpital. « Nous passons notre temps à nous réorganiser. Nous sommes un peu lassés », évoque le Pr Rémi Salomon. Il concède toutefois qu’il faut « améliorer la gouvernance et le management des équipes » : « clairement, nous avons des progrès à faire ».

Pour de nouvelles pratiques managériales à l’hôpital

Et ce, tout en évitant le « directeur bashing » : « ce qui se cache derrière, c’est du ‘politique publique bashing’ », pointe Jérôme Goeminne.

Quitte à inventer des « modes de gouvernance innovants », glisse-t-il. Au sein du GHT Coeur Grand Est, « nous parions sur des pôles territoriaux avec des délégations », évoque-t-il. « Nous visons la suppression des directions d’établissements pour les confier à des soignants ou des médecins. »

Autre piste : réhabiliter les espaces de discussions pour que chacun puisse échanger sur l’organisation et les conditions de travail.

Restructurer tout le système de santé

Mais l’hôpital ne peut pas tout… « Les systèmes hospitaliers clairement plus efficaces que les nôtres, en Allemagne, dans les pays du Nord… le sont vraisemblablement avant tout parce-que la médecine de soins primaires est beaucoup mieux organisée, parce-que l’hôpital n’est pas la variable d’ajustement d’un certain nombre de déséquilibres, estime Cédric Lussiez. Il peut donc se concentrer sur un certain nombre de missions en étant efficace. »

Il faut donc, inéluctablement, restructurer tout le système de santé. Et ce, sans tarder car la situation ne fera qu’empirer, de l’avis de Jérôme Goeminne. Ce dernier appelle ainsi à du « courage politique ».

 

Où va l’hôpital ?

Quelles que soient les solutions, il faut en discuter, il faut des choix politiques. La base : la transparence et confiance, selon Jérôme Goeminne.

 

 


*Débat organisé et animé par Philippe Leduc (LDC Santé), Pascal Maurel (Ortus) et Renaud Degas (La Veille des acteurs de la Santé – Presse Infos +) au Solférino, boulevard Saint-Germain, à Paris.

En partenariat avec Le Groupe Pasteur Mutualité, Groupe Point Vision, Carte blanche, Canon Medical, Qare et BVA.


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