Transition démographique, explosion des maladies chroniques, changement climatique, mondialisation des échanges et risque accru de nouvelles épidémies, prévention, dépistage… Les enjeux de santé publique sont vastes. Et justement, le 10 février, le Directeur général de la Santé Grégory Émery est venu exposer la vision de l’État sur ce sujet lors des Contrepoints de la Santé, que nous co-produisons. Quelles sont les réponses apportées aux grands défis actuels ? Sont-elles à la hauteur des enjeux ? Autant de questions que nous avons abordées avec lui. En voici les principaux ensiegements.
Un rôle renforcé de l’État en santé publique
« Même si la stratégie nationale de santé n’a pas encore été publiée, elle guide notre action quotidienne et fixe des objectifs clairs, qu’il s’agisse de lutter contre l’obésité, d’améliorer la prise en charge des maladies cardiovasculaires ou de réduire la mortalité », affirme Grégory Emery. L’action de la Direction générale de la Santé (DGS) s’organise autour de quatre axes, rappelle-t-il : anticiper, agir pour la santé de chacun, protéger les plus vulnérables et renforcer la coopération avec les acteurs de santé.
L’intelligence artificielle au service de la santé
L’IA est perçue comme un levier essentiel pour améliorer le dépistage, l’accompagnement des professionnels, l’information ciblée des patients, l’optimisation de l’organisation des soins et, plus largement, le soutien aux missions de l’État, souligne Grégory Emery. Pour cela, la France dispose d’un atout majeur avec son volume de données issues du système de remboursement et des hôpitaux. L’objectif est toutefois, aujourd’hui, d’enrichir ces informations et de mieux les croiser pour anticiper les besoins de santé et adapter les politiques publiques, poursuit-il, évoquant notamment les projets menés par le Health Data Hub et le Green Data for Health, en partenariat avec le ministère de l’Environnement.
Un système de santé à réorganiser
La pénurie de médicaments reste un problème structurel. Grégory Emery insiste sur les efforts de relocalisation et l’usage plus rationnel des stocks : « Nous devons adapter la prescription et la dispensation des médicaments pour limiter les tensions d’approvisionnement. »
Quant à la pénurie de soignants, le défi est « mondial ». Pour Grégory Emery, la réponse ne repose pas uniquement sur l’augmentation du nombre de professionnels, mais aussi sur une meilleure organisation des soins et un renforcement des actions de prévention.
La vaccination et la prévention, des priorités affirmées
Sur ce point, bien que les campagnes de vaccination soient mieux perçues, l’adhésion reste à renforcer. « La prévention ne doit pas se résumer à la seule vaccination, mais englober un véritable changement de culture, dès le plus jeune âge », ajoute le DGS.
Sur le plan de la lutte contre les addictions et, notamment, contre la drogue, la campagne du ministre de l’Intérieur n’a pas été coordonnée avec la DGS. Grégory Emery rappelle néanmoins que « réduction des risques et répression doivent avancer ensemble » et défend une approche de sensibilisation plutôt que de stigmatisation.
Le défi de la santé environnementale
Le changement climatique et son impact sur l’émergence de maladies infectieuses, les ressources en eau ou encore, l’alimentation et les infrastructures, a également été évoqué. « Nous devons intégrer ces enjeux dans nos politiques de santé », pointe le DGS.
Le risque de nouvelles épidémies impose également une vigilance constante. Un stock de 1,4 milliard de masques est disponible et la surveillance des agents pathogènes est renforcée. « Nous avons appris du Covid, mais nous devons continuer à nous préparer activement », reconnait-il.
Un centre de crise sanitaire renforcé
De fait, « nous avons créé un nouveau centre de crise sanitaire qui assure une veille 24h/24, 7j/7, avec des effectifs doublés pour répondre rapidement à toute alerte » de santé publique, explique Grégory Emery. Les Jeux Olympiques ont d’ailleurs permis de tester et de perfectionner le dispositif.
Le DGS défend également une communication simple et opérationnelle, conçue en collaboration avec les professionnels de santé. Et ce, afin de rendre les messages « DGS urgent » accessibles à tous, même à ceux qui disposent de peu de temps, assure-t-il.
Le rôle clé de l’OMS
Le Directeur général de la Santé réaffirme, enfin, l’importance de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). « Son approche normative nous assure que nos politiques publiques reposent sur la science et l’état des connaissances, et non sur des croyances ». Pour lui, la coopération et la coordination internationales sont indispensables pour faire face aux crises sanitaires mondiales. Et le retrait des États-Unis et de l’Argentine de cette organisation est, à ce titre, jugé préoccupant.
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Parmi les chiffres clés :
- 45 % des Français estiment que le changement climatique et la mondialisation sont les principaux défis de santé publique.
- 30 % considèrent que le vieillissement de la population est un enjeu majeur.
- 17 % perçoivent la transition numérique comme un levier clé pour l’avenir du système de santé.
- 44 % des Français souhaitent une amélioration des politiques de prévention et d’accompagnement individuel.
- 6 Français sur 10 font confiance aux pouvoirs publics en matière de politique vaccinale et de lutte contre le cancer. En revanche, la confiance est bien plus faible sur la lutte contre les pénuries de médicaments, la santé mentale et la santé environnementale.
- 79 % des Français estiment qu’une nouvelle pandémie est probable dans les années à venir.
- 54 % jugent que la France et l’Europe n’ont pas su tirer les leçons du Covid-19 et ne seraient pas prêtes à y faire face