Points de vue

Les Contrepoints de la Santé - 20 décembre 2019

Données de santé : entre volontarisme et vigilance

Le numérique, l’utilisation éthique des données de santé et les perspectives du Health Data Hub étaient à l’honneur lors des derniers Contrepoints de la Santé*, organisés le 18 décembre en partenariat avec La Veille des Acteurs de la Santé. Le sujet a été défriché avec Stéphanie Combes, directrice du Health Data Hub, David Gruson, fondateur d’ETHIK-IA, le Pr Laure Fournier, de l’Hôpital européen Georges Pompidou, et le député Pierre-Alain Raphan. Synthèse.


Un évènement en partenariat avec :


Intégrale du débat


Le Health Data Hub, plate-forme d’exploitation des données de santé, a été officiellement créé le 30 novembre dernier. Il doit permettre de croiser les bases de données de santé existantes et de faciliter l’utilisation de ces dernières à des fins de recherche. « Les nouveaux outils, comme le traitement de masse des données de santé et l’intelligence artificielle, vont permettre d’importants progrès dans l’accompagnement des patients, l’évaluation et le choix des traitements et la gestion du système de santé », justifie le ministère de la Santé.

Sa mise en place fait suite « au rapport de M. Cédric Villani concernant l’intelligence artificielle, qui appelait à partager des données de santé », a rappelé Stéphanie Combes, directrice du « HDH » à l’occasion des Contrepoints de la Santé.

Le Health Data Hub, c’est quoi


Ses contours restent toutefois flous pour de nombreux Français. « Il est du devoir du Health Data Hub d’accompagner les citoyens », a convenu Mme Combes. Et d’ajouter que la « première chose » qu’elle souhaite faire, c’est « publier les engagements » du HDH et expliquer au grand public en quoi consiste cette plate-forme, quel est son intérêt, comment les données sont protégées et comment chacun peut s’opposer à leur utilisation.

Pour une utilisation éthique des données

« Le Health Data Hub doit être un facilitateur », a synthétisé Renaud Degas, directeur de la Veille des acteurs de la Santé. En ce sens qu’il doit faciliter l’accès des équipes de recherche publiques et privées à des données de santé anonymisées.

Données de santé du privé au service du public et inversement

Données d’imagerie médicale, le projet DRIM France IA


Le Pr Laure Fournier, du service de radiologie de l’Hôpital européen Georges Pompidou, a néanmoins appelé à « utiliser éthiquement les données » en question, c’est-à-dire « à bon escient » : pour améliorer la « pertinence des examens » (offrir le bon examen au bon patient au bon moment) et la « prévention » (utiliser les précédents examens des patients pour déterminer s’il y a des données qui permettraient de prévenir la maladie), par exemple.

Sur la même longueur d’ondes, David Gruson, fondateur d’Ethik-IA, a insisté sur le fait que « la collecte, l’utilisation de ces données de santé doit être dans un intérêt de bien commun », en particulier lorsqu’elles sont utilisées « par le secteur privé ». Il a par ailleurs suggéré de « définir un cadre de confiance permettant l’accès aux données de santé » et, pourquoi pas, de « créer un intégrateur pour aller dans le sens d’un Health Data Hub européen ».

« Il n’y a jamais d’absence de risque »

La concentration des données au sein d’un même hébergeur suscite néanmoins des inquiétudes. « Nous voulons le Health Data Hub mais retardé, le temps de s’assurer des risques », a exposé le député Pierre-Alain Raphan.

« Concernant le risque, très concrètement et objectivement : il ne faut pas freiner l’innovation. Il n’y a jamais d’absence de risque. Mais à retarder, nous risquons une mise en place moins éthique, l’effet inverse de ce que nous souhaitons ! », a alerté David Gruson. Tout en rappelant que la France a « le niveau de protection des données le plus élevé au monde ».

Selon lui, « là où nous devons être vigilants, c’est sur le départ de nos données de santé en dehors de nos espaces qui n’auraient pas les mêmes protections que nous ».

À qui appartiennent les données de santé

Health Data Hub, plateforme de la discorde ou de la concorde


La crainte des Gafam et du Cloud Act

Or c’est là que le bât blesse. « Les données de santé du Health Data Hub sont stockées sur des serveurs Microsoft, a ainsi déploré M. Raphan. Le risque que les Américains aient accès à ces données est réel. »

Il s’interroge ainsi sur la sécurité des données, alors même que « la Gendarmerie, l’Armée, la Police se retirent de ces géants du numérique ». De fait, en vertu de la législation américaine – à savoir le « Cloud Act » – toute entreprise américaine peut être sollicitée par un juge américain pour fournir les données qu’elle détient…

Ce à quoi Stéphanie Combes a répondu que « Microsoft était le meilleur en termes de sécurité à l’époque où nous cherchions un serveur » tout en reconnaissant qu’ « il n’y avait pas vraiment de compétiteurs ».

Données de santé, exemples concrets d’espoir

Focus

Les Français ont des attentes énormes en matière de numérique

▶️ 89% des Français aspirent à avoir le Dossier médical partagé (DMP) en ligne
▶️ 84% des Français espèrent un meilleur suivi de leur dossier médical
▶️ 76% espèrent de fait moins de redondance des soins
▶️ 52% restent cependant sur leurs gardes
▶️ 81% souhaitent un développement des applis de prévention au quotidien
▶️ 18% seulement déclarent consulter leur DMP
▶️ 10% échangent avec leur médecin sur leurs données de santé
▶️ 60% n’ont pas confiance en raison d’un potentiel piratage
▶️ 34% des Français n’ont aucun problème à confier leurs données à des entreprises

Source : BVA Santé

 


*Débat organisé et animé par Philippe Leduc (LDC Santé), Pascal Maurel (Ortus) et Renaud Degas (La Veille des acteurs de la Santé – Presse Infos +) au Restaurant CoCo, à l’Opéra Garnier.

En partenariat avec Le Groupe Pasteur Mutualité, Groupe Point Vision, Carte blanche, Canon Medical, Qare et BVA.


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