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L’oeil de la rédaction - 21 octobre 2025

Florence Arnoux-Liogier : « Pour la jeune génération de leaders publics en santé, décloisonner n’est pas une option, c’est un réflexe »

Alors que le service public de santé traverse de profondes mutations — tensions sur les ressources humaines, recomposition territoriale de l’offre de soins, nécessité d’accélérer la transition écologique et numérique —, une nouvelle génération de dirigeants incarne un renouveau fondé sur l’engagement, l’innovation et la coopération. Pour valoriser ces profils et nourrir le débat public, La Veille Acteurs de santé lance, en partenariat avec le Think Tank Penser Public, une série de portraits. Florence Arnoux-Liogier*, présidente de l’association et figure engagée du monde hospitalier, détaille le sens de cette démarche et l’ambition.

 

Propos recueillis par Renaud Degas avec Maellie Vezien

 

 

Pourquoi lancer une série de portraits de la jeune génération de leaders en santé du service public ?

Florence Arnoux-Liogier : Il est essentiel de montrer que le service public de santé attire encore et toujours des profils de haut niveau, motivés et engagés. Ces jeunes dirigeants ne se contentent pas d’occuper des fonctions : ils veulent être utiles, agir concrètement et inscrire leur action dans la durée. On parle souvent d’un désenchantement du service public, mais sur le terrain, je vois au contraire une génération animée par la conviction que le collectif reste un levier de transformation.

 

 

Quels traits particuliers distinguent cette génération ?

FAL : D’abord leur rapport au collectif. Ils ont une approche beaucoup plus transparente et collaborative. Ils choisissent leurs environnements de travail en fonction des valeurs, du projet collectif et du style de management.

Ensuite, ils portent très naturellement les enjeux de transition — notamment écologique et énergétique, mais aussi sociale et organisationnelle. Quand une mission touche à ces sujets,  l’enthousiasme est palpable.

Beaucoup veulent contribuer à la réduction de l’empreinte carbone de leur institution, repenser le management. Ils ne se sentent pas contraints par les frontières administratives ou les silos institutionnels. Ils avancent en réseau. Pour eux, décloisonner n’est pas une option, c’est un réflexe. Ils dialoguent avec les territoires, les collectivités, les associations, les patients, la société civile ; cette ouverture rend leur action à la fois plus légitime et plus efficace. C’est une force précieuse pour l’action publique d’aujourd’hui.

 

Quels sont les enjeux de donner à voir ces parcours dans une série de portraits ?

FAL : Avant tout, rendre compte de la richesse et de la pluralité des profils, des parcours et des convictions de cette nouvelle génération. Chaque portrait doit refléter la singularité d’un engagement : certains viennent de filières hospitalières classiques, d’autres ont exploré le médico-social, d’autres encore ont travaillé dans le secteur privé ou à l’international avant de revenir dans le public. Tous partagent un même moteur : servir et transformer.

Mais nous voulons aussi montrer la réalité de leurs contraintes. Les responsabilités publiques restent exigeantes, souvent sous tension.  Travailler en administration centrale, au sein d’une agence régionale de santé ou diriger un établissement de santé aujourd’hui, c’est porter une responsabilité lourde, composer avec des injonctions parfois contradictoires, et garder le cap face à une demande sociale très forte. Ces réalités doivent être dites, sans filtre, car elles font partie intégrante de l’exercice.

Enfin, cette série de portraits veut ouvrir un horizon positif : donner envie, susciter des vocations, redonner de la fierté à servir le public et montrer que nos institutions restent des espaces d’innovation et de transformation. En valorisant ces visages et ces convictions, nous voulons nourrir un débat public plus juste et dépasser les caricatures sur l’action publique.

 

Quel rôle joue Penser Public dans cette démarche ?

FAL : Penser Public est un “think and do tank”, conçu comme un espace indépendant, où se croisent dirigeants publics, chercheurs, citoyens engagés. Nous voulons créer des passerelles, éclairer l’action publique par des regards variés, renforcer la confiance entre institutions et citoyens, mais aussi expérimenter et agir. Cette série de portraits prolonge naturellement cette mission. En donnant à voir des figures concrètes du renouveau du service public en santé, nous montrons que, derrière les grandes réformes, il y a des femmes et des hommes qui façonnent déjà les transformations en cours, parfois discrètement mais efficacement. Mettre en avant ces parcours, dans l’administration centrale, dans les établissements, dans les agences ou d’autres acteurs publics comme les financeurs publics, c’est bien sûr ouvrir un espace d’inspiration et de dialogue entre générations de décideurs, mais c’est aussi envoyer un signal fort à la société : le service public de santé n’est pas un modèle du passé, c’est un laboratoire d’avenir.

 

 

(1) Florence Arnoux-Liogier est Déléguée Fédération Hospitalière de France (FHF) de la région PACA. Elle est également vice-prédente de l’Association des directrices et des directeurs d’hôpital (ADH) qu’elle représente au sein de Penser Public

 

 

 

 

« Repérer et donner la parole aux nouvelles générations de dirigeants du secteur public de la santé »

« Avec La Veille Acteurs de santé, l’équipe de l’agence de presse Pi+ s’est donné pour objectif de donner la parole aux dirigeants du secteur de la santé, qu’ils soient dans le public ou dans le privé, et de comprendre leurs enjeux, objectifs et défis. À ce titre, il est important pour nous de repérer et de donner la parole aux nouvelles générations de décideurs. Le partenariat noué avec Penser public nous permet de gagner en temps et en pertinence dans le repérage des talents d’aujourd’hui et de demain du secteur public. Certains sont déjà dans la lumière, et nous n’allons pas nous priver de les rencontrer. D’autres le sont moins, mais sont appelés à occuper des postes clés. Et nous serons heureux de faire leur connaissance et de partager avec nos lecteurs leurs approches qui, nous l’espérons, alimenteront la réflexion collective sur l’évolution de notre système de santé, qui doit faire face à de très nombreux et difficiles défis. »

Renaud Degas, Directeur de La Veille Acteurs de santé et de l’agence de presse Pi+

 

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